La résilience, une clé primordiale des initiatives de transition
Construire la résilience est l’un des grands principes de la Transition. Pour bien saisir le cœur et l’esprit de ce mouvement, il est donc utile de s’y attarder. L’idée est qu’il suffit d’observer la structure et le fonctionnement de ce qui est soutenable dans la nature, pour s’en inspirer. Une forêt millénaire, par exemple, produit énormément de matière vivante, et pourtant elle ne produit pas de déchets. Elle est composée d’un réseau dense et complexe d’interactions entre de nombreux êtres vivants. Elle est très résiliente.
La permaculture comme culture durable est une technique pour fabriquer de la résilience humaine dans tous les domaines de la vie: agriculture, logement, organisation, transports, etc. L’application à grande échelle des principes de permaculture est la (Transition).
Les initiatives de transition aident à construire la résilience dans plusieurs domaines et niveaux (personnel, communal, organisationnel au niveau local et national, avec une perspective globale / internationale. Les personnes fortement impliquées dans la transition devraient d’ailleurs particulièrement faire attention à cela. La résilience personnelle commence donc à être organisés dans les groupes de Transition.
On parle de résilience à beaucoup de niveaux: individus, communautés, organisations, société, écosystème. Au niveau organisationnel, un des niveaux les moins bien étudiés, la résilience est la capacité d’un groupe ou des groupes à supporter des chocs et des tensions extérieurs sans perturbation significative.
Il y a trois facteurs qui déterminent le degré de résilience d’une organisation:
Tableau 11. Montre les facteurs déterminant le degré de résilience d’une organisation
Niveau |
Description |
1 |
La capacité d’une organisation à prendre ou modifier des décisions qui la concernent, à augmenter l’engagement local; |
2 |
La capacité d’une organisation à apprendre et à s’adapter par favoriser une éducation diversifiée incluant de nouveaux savoirs et savoir-faire et expériences |
3 |
La nécessité pour des organisations résilientes de planifier la planification collective. |
Source. Servigne. Pablo (2011), adapté.
L’intérêt de la résilience est qu’il s’agit plutôt d’être mieux préparés pour un avenir plus sobre, plus autosuffisant qui favorise ce qui est local au lieu de ce qui est importé.
Le mouvement de la Transition consacre beaucoup d’énergie à étudier comment vivaient les communautés avant leur déstructuration par le pétrole. Deux institutions humaines apparaissent de façon récurrente à travers les vicissitudes de l’histoire et témoignent d’une extraordinaire résilience, l’une rurale, la petite exploitation paysanne autosuffisante, l’autre plus urbaine, l’atelier artisanal. La résilience, c’est plutôt un retour en avant.
La Transition quant à elle, ne propose pas de réduire, mais invite plutôt à construire et augmenter sa résilience. La croissance économique et une prospérité renouvelée viendra dans une large mesure d’économies locales diversifiées, vibrantes et robustes. La meilleure réponse à l’instabilité économique est de passer à une économie basée sur la justice sociale, la résilience et la protection de la biosphère. Rien d’autre n’a de sens.
De manière plus théorique, augmenter la résilience d’une organisation, c’est augmenter la diversité des éléments qui le composent (individus, équipes, communautés, éléments, etc.), ainsi que les fonctions qu’ils exercent. Ainsi, si l’un des éléments s’arrêtait, il resterait encore les autres pour assurer la fonction.
Il faut veiller à favoriser la modularité, un module ne doit pas devenir indispensable à la survie de tous les autres. Ainsi, si une maladie apparaît à un endroit, le cloisonnement génétique empêchera l’apparition d’une épizootie. C’est simplement un principe du vivant appliqué à l’organisation humaine.
Un autre point à prendre en compte pour construire la résilience, c’est de favoriser ce qu’on appelle les « rétroactions directes », c’est-à-dire tenter de se rapprocher de l’effet de nos actions, percevoir directement les effets de la consommation permet d’agir rapidement et en pleine conscience.
La résilience se construit dans les détails, et se coordonne à grande échelle. Il faudra donc coordonner en réseau après avoir bâti des initiatives locales solides.
La résilience constitue finalement un alliage prometteur de catastrophisme et d’optimisme, stimulant tant pour la réflexion que pour l’action. Elle renouvelle notre imaginaire politique, socio-économique et environnemental. Source. Servigne. Pablo (2011).
Les scientistes ont proposé des modèles pour bâtir la résilience organisationnelle tels que le modèle de Gratton et all (2010) envisageant la résilience dans les organisations sanitaire, et le modèle de ELLIS.W, Dietz.W (2017) visant la résilience basée sur les expériences des enfants et communautés dans les organisations comme les montrent les figures suivantes.

Le modèle suivant illustre la résilience organisationnelle et ses composants.

Les indicateurs de la résilience dans les territoires
Contextualiser les indicateurs de résilience confirme la nécessité de rechercher un équilibre dynamique et une pondération entre des qualités/propriétés a priori paradoxales et directement liées à la situation locale dans un tel territoire. Un territoire est plus que la somme de ses composantes structurelles, géographiques, sociales, économiques, etc. Les grilles et tableaux classiques sont statiques et ne traduisent pas la mise en mouvement, les capabilités locales, et les dynamiques.
L’approche par les indicateurs ne suffit donc pas et nécessite de faire appel à la sociologie non quantitative, et de se confronter au terrain afin d’intégrer à l’évaluation l’histoire, la culture, l’identité du territoire, la stratégie politique envisagée. Source. Cerema /DtecTV-CGDD/Soes (2014).
L’approche mixte (Qualitative/ Quantitave) s’appuie sur l’établissement d’un profil territorial, croisé avec le projet politique local et des indicateurs de vulnérabilité. Les indicateurs peuvent être mobilisés à différents moments dans une logique préventive, et doivent permettre d’identifier les risques environnementaux, économiques et sociaux auxquels un territoire est exposé. Par la logique d’évaluation, les indicateurs retenus devraient donner quelques éléments d’appréciation de la réussite ou de l’échec des actions mises en œuvre en faveur de la résilience. Source. Desrosières, A. (2008).
Les indicateurs dans une logique préventive, et des risques facilitent la compréhension de résilience par l’avance, et poussent les acteurs à chercher des solutions pour y anticiper comme le montre la figure suivante.

Les indicateurs peuvent être utilement mobilisés à différentes étapes d’une analyse portant sur la résilience des territoires comme le montre la figure suivante.
Thème |
Indicateur |
Calcul |
Risques/Chocs
– Intensité
– Origine (climatique,
Économique…)
– nature (idiosyncratique, collectif…)
Gestion du risque ex ante
– Mutualisation
– Assurance
– Diversification d’activité
Diversification agricole |
Nombre de choc
Choc climatique (cyclone, inondation, sécheresse, grêle, incendie, feu, foudre)
Choc culture: animaux et hommes (rats troupeaux insectes oiseaux criquets, hommes)
Choc maladies/décès
Evaluation des pertes suites aux chocs
Combien de logements entre 3 et 4 ?
Combien d’élevage entre 3 et 4 ?
Combien de ménage entre 2 et 3 ?
Epargne en nature
Dons aux personnes en difficulté Dépenses festives
Détail des activités off farm (importance)
Nb de jours dédiés au service liés au tourisme Intégration agriculture élevage
Nb de cultures différentes cultivées |
Regroupement des différents types de chocs par origine
Nombre de choc d’intensité 3 et 4
Rajouter une question sur grenier commun
Autre activité
Nb semaine autre activité / (Nb semaine autre +activité principale)
Gain autre activité/ gain autre + gain agri |
Capital
Gestion du risque expost: Généraux |
Ménage qui a mis en vente une parcelle ou du gros matériel (par suite d’un choc) ?
Migration raison de la migration + Nb |
Deux variables différentes sur migration |
Capital physique
Matériel/animal
Surface |
Nb de ménage possédant au moins un des trois
Radio téléphone tv
Nb d’animaux du ménage (bovin, caprin, porc, volaille)
Nb de ménage possédant au moins un moyen de transport: bicyclette, moto, voiture
Superficie rizicole mise en culture Nb de parcelles (Superficie moyenne des parcelles) Quantité des semences autoproduites Quantité alimentation du bétail autoproduite Quantité de fertilisants autoproduits |
|
Capital humain
Composition du ménage
Éducation |
Genre du chef de ménage Age du chef de ménage
% des enfants dans le ménage Part des actifs
Nb de bouches à nourrir
Alphabétisation
Diplôme maximum dans le ménage
Nb de personnes ayant suivi une formation Distance ou temps pour aller à l’école |
Nb de pers du ménage qui savent lire |
Capital social
Famille, réseau social
Implication politique
Exclusion sociale |
Part des transferts reçu dans RBD Variable: don aux enfants
Type d’installation (héritage achat)
Fonction sociale dans une OP
Au – 1 des membres a participé à une action collective
Aide extérieure (des autres membres du village) Transfert (donné et reçu)
Entraide en riziculture Entraide autre culture |
Transfert reçu/revenu |
Capital économique
Crédit et financement
Mode de faire valoir |
Emprunt (cf viabilité économique) Montant des crédits d’investissement Montant des crédits de fonctionnement Crédit formel
Crédit informel
Culture rapportant le plus d’argent Statut foncier de la parcelle Surface en propriété
Surface pris en fermage Surface donnée en fermage Surface prise en métayage surface données en métayage
Litige ou conflit foncier ? |
On additionne tout le tb de la p12 |
Sécurité alimentaire
Autoconsommation
Calories et diversification |
Autoconsommation
Po autoconsommée/Consommation Période de soudure
Consommation alimentaire en calories Consommation alimentaire en protéines Indicateurs de diversification
A quelle fréquence consommez-vous … ? |
Différentes variables sur les aliments consommés par les ménages en fonction des différentes périodes
A quelle fréquence mangez-vous de la viande ? A quelle fréquence mangez-vous des légumes ? |
Durabilité économique |
Produit brut Marge brute
Nb de salariés familiaux et permanents
Marge nette
Valorisation de la journée de travail Pté du travail
Revenu du ménage
Revenu par personne
Culture rapportant le plus d’argent
Dépense
Part des dépenses alimentaires Dépenses par tête
Dépenses exceptionnelles
Epargne Credit
(Crédit d’investissement et de fonctionnement)
Emprunt à vocation agricole/ emprunt non agricole
Solde de trésorerie (= CAF) Ratios
Ratios couverture des CI par l’emprunt
Ratio d’intensification Retour sur Investissement Ratios autoconsommation
Solde accumulé
Accès à l’info généraliste (radio et téléphone portable)
Accès route
Part des actifs
Parts des inactifs dans le ménage |
Qté produites*Prix de vente à la ferme Produit brut –CI – frais de fonctionnement Rapport entre les 2
Marge brute – frais financier
Marge nette / Nb d’heures de travail
Revenu agricole + revenu extra agricole Revenu total/ nb de membres
Regarder les proportions et l’évolution des différents types de dépenses
Revenu total – dépenses totales
Sommes empruntées/CICI/
Marge brute
Marge brute/ CI
Riz autoconsommé/ riz produit
Nb de ménage possédant ou une radio ou un téléphone Temps de trajet jusqu’au marché |
Durabilité sociale
Capital social (Cf résilience)
Equité
Rapport hommes femmes
Sécurité |
Insécurité Confiance voisins |
Nb de personnes ayant été victime d’une des 6 catégories/pop échantillon |
Durabilité sanitaire
Santé mère et enfants
Accès à l’eau |
Accès aux vaccins et aux soins médicaux Nb d’enfants complètement vaccinés Moustiquaire
Accès à l’eau |
Adition de tous les vaccins
Nb de femmes enceintes dormant sous moustiquaires Provenance de l’eau conso par ménage |
Durabilité environnementale
Erosion
Biodiversité
Eau
Impact des innovations |
Construction d’1 indicateur actuellement Biodiversité évolution des insectes utiles à la
Production
Disponibilité et qualité de l’eau Pb d’irrigation récurrent
Perception des SCV Adoption des scv |
|
Durabilité institutionnelle/Gouvernance
Service public
Gouvernance
APD |
|
Les indicateurs permettant de mesurer la viabilité institutionnelle et la gouvernance seraient peut-être plus pertinents à l’échelle du territoire ? |
Figure 34. Montre les indicateurs de résilience dans les territoires
Source. Marie Bar, Eric Penot & Hélene Benz.(2011), Adapté.
Le recours aux indicateurs pour l’établissement du diagnostic stratégique et du profil du territoire est assez classique dans certains pays.
Au niveau du diagnostic stratégique, il permet de prendre un peu de distance avec la vision et la narration passionnées des élus évoquant leur territoire.
Au niveau du profil, les indicateurs relativisent les atouts et handicaps du territoire, puisqu’ils reflètent ce qui le distingue d’une zone de référence. Le choix de cette zone de référence est important. Il peut s’agir d’un territoire d’une nature de taille de population, de moins de 50 000 habitants, entre 100 000 – 300000 habitants, entre 300 000 – 500 000 habitants ou plus de 500 000 habitants. Une autre façon de procéder consiste à constituer des classes homogènes de territoires, des classes de pays qui composent la classe à laquelle le territoire étudié a été affecté constituent alors autant de zones de référence.